Le diagnostic de TND : quel parcours ?

Le diagnostic de TND : quel parcours ?
02.05.2024 L’essentiel Temps de lecture : 6 min

Les recommandations de bonnes pratiques de la HAS insistent sur l’importance du repérage précoce des écarts inhabituels de développement chez l’enfant. Depuis 5 ans, le déploiement des plateformes de coordination et d’orientation (PCO) permet d’accélérer les diagnostics des troubles du neurodéveloppement (TND) mais le parcours reste compliqué.

Pour parvenir à un diagnostic stabilisé de trouble du neurodéveloppement (TND), le chemin est ponctué d’étapes plus ou moins longues selon les territoires et les ressources en présence. Seul un médecin, le plus souvent un neuropédiatre ou pédopsychiatre, peut poser un diagnostic de TND . Il s’appuie sur son expertise et sur les bilans recueillis par d’autres professionnels : neuropsychologues, psychologues, ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, etc.

Chaque année, 35 000 enfants naissent avec un trouble du neurodéveloppement (TND), qu’il s’agisse de troubles du développement intellectuel, de la communication, du spectre de l’autisme, des apprentissages, de la motricité, de trouble de l’attention-concentration…

Ils seront diagnostiqués en moyenne vers 7 ans.

Un diagnostic élaboré grâce aux expertises pluriprofessionnelles

Le repérage précoce des troubles du neurodéveloppement est pourtant l’une des conditions essentielles pour mettre en place les interventions recommandées durant la période de plasticité cérébrale maximale des 1000 premiers jours. Le plus souvent, ce sont les professionnels dits de première ligne (médecin traitant, PMI, médecin scolaire, enseignants, professionnels de la petite enfance) qui vont recueillir les inquiétudes des parents et les sensibiliser au fait que le développement de l’enfant n’est pas tout à fait typique (autrement dit qui diffère par rapport à celui d’un enfant du même âge).

Tout médecin peut alors utiliser la grille de repérage de la Haute Autorité de Santé (HAS) pour les 0-6 ans, qui catégorise des signes d’alerte selon l’âge. Pour les 7-12 ans, le livret de repérage comporte trois volets, qui doivent être complétés par la famille, par l’enseignant et par le médecin qui examine l’enfant.

Lorsque plusieurs signes d’alerte sont repérés, l’enfant peut être orienté par un médecin vers les structures de 2ème ligne constituées d’équipes pluriprofessionnelles, spécifiquement formées aux TND : CAMSP (Centre d’Action Médico-Sociale Précoce) ; CMPEA et CPEA (Centre Médico-Psychologique pour Enfant et Adolescent) , CMPP (Centre Médico-Psycho-Pédagogiques), SSR (Soins de Suite et de Réadaptation) et PCO (Plateforme de Coordination et d’Orientation). Celles-ci permettront d’émettre des hypothèses de diagnostic, avant d’avoir recours aux professionnels de 3ème ligne comme les centres de ressource autisme ou les services de pédopsychiatrie hospitaliers, en particulier pour les diagnostics complexes.

Le rôle des PCO et des réseaux de soins

Créées en 2019, les Plateformes de Coordination et l’Orientation (PCO) veulent proposer aux familles un parcours de soins sécurisé et fluide, tout en garantissant une prise en charge financière via le forfait d’intervention précoce.

Il en existe aujourd’hui 112, départementales ou interdépartementales, accessibles uniquement après un adressage médical. L’objectif ? Faire bénéficier à l’enfant, sans retard, de bilans spécialisés qui permettent d’établir un diagnostic fonctionnel précisant le ou les troubles repérés et du démarrage des interventions rééducatives nécessaires, afin de diminuer l’impact des TND sur la vie quotidienne.

Coordinatrice de l’antenne Allier de la PCO Cantal Allier Puy-de-Dôme (PICO CAP), Pauline d’Elloy réceptionne les formulaires de repérage, étudie les dossiers avec un pédopsychiatre ( le médecin coordinateur de la PCO) et oriente les enfants vers des bilans et des suivis en neuropsychologie, psychologie, ergothérapie et psychomotricité.

Ces professionnels formulent ensuite des hypothèses diagnostiques, qui peuvent être confirmées ou non par les médecins (le plus souvent des neuropédiatres), en général à la fin de l’année d’intervention. Nous accompagnons aussi les familles sur les dossiers MDPH et les recours éventuels, lorsqu’ils ont eu accès au diagnostic. Lorsqu’un enfant est suspecté de troubles autistiques, nous essayons de le réorienter vers nos collègues du Puy de Dôme, pour la réalisation de bilans spécifiques de type ADOS

pauline elloy

Alors que 300 enfants sont actuellement en cours de suivi pour l’Allier, la plateforme connaît une forte montée en charge de son activité ces dernières années : + 72 % d’augmentation des adressages de juin 2022 à juin 2023.  « Les parents ont tout intérêt à connaître l’existence de la plateforme, qui permet d’aboutir à un diagnostic et de financer un bilan et 35 séances par professionnel, y compris pour l’offre libérale non conventionnée, de manière à ce qu’il n’y ait pas de reste à charge », souligne Pauline d’Elloy.

Sur certains territoires, il existe aussi des réseaux de soins coordonnés, nés avant les PCO, pour apporter une réponse experte aux questions que se posent les parents, les professionnels de santé ou les enseignants sur l’éventuelle existence d’un trouble neurodéveloppemental.

C’est le cas du réseau Aloïs, un centre d’expertise pour la santé cognitive, créé à Paris en 2004 par le Dr Bénédicte Défontaines.

Dr en neuropsychologie et neuropsychologue, et référente de l’antenne lyonnaise, Géraldine Lebrun Guillaud souligne l’importance d’une vision pluridisciplinaire.

Nous sommes cinq neuropsychologues au pôle enfant. Nous avons une expertise clinique dans les troubles du neurodéveloppement ainsi qu’une activité de recherche et de formation sur les TND. Nous voyons l’enfant sur deux plages de rendez-vous de 2h15 chacune, qui comprennent un entretien clinique, des évaluations psychométriques et une consultation de restitution, avant de procéder à la rédaction du compte-rendu neuropsychologique qui sera présenté en staff clinique, avec une médecin généraliste, spécialiste des TND. Les tests sont un outil à disposition des psychologues mais la clinique est aussi très importante : l’enfant n’est pas réduit à un chiffre ou une épreuve donnée. Les temps d'échange avec les parents sont primordiaux. On vient faire une analyse globale et fine du profil cognitif de l’enfant et des répercussions des difficultés rencontrées dans sa vie quotidienne

geraldine lebrun guillaud

Les neuropsychologues du réseau Aloïs émettent ensuite des hypothèses de diagnostics et des préconisations de prise en charge. Ce sont ces regards croisés et l’ensemble de ces expertises qui permettront d’aboutir au diagnostic.

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