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Le guide Troubles de l’alimentation et handicap mental sévère vous apporte des repères et des conseils sur les troubles de l’alimentation des personnes en situation de handicap. Voici un extrait portant sur les troubles de la mastication…
Réseau-Lucioles a publié en 2014 l’ouvrage « Troubles de l’alimentation et handicap mental sévère ».
Ce livre vous apporte des repères et des conseils pour mieux prendre en charge les troubles de l’alimentation des personnes en situation de handicap.
La mastication
Croquer, mastiquer et déglutir sont des fonctions qui font intervenir les dents, le système neuromusculaire bucco-facial, et le psychisme de l’individu. Dans la mesure de son autonomie, l’individu choisit ses aliments, les prépare pour sa consommation en fonction de ses préférences socio-culturelles et les porte à sa bouche selon ses possibilités motrices.
La mastication joue son rôle en trois temps dans le processus alimentaire :
- Elle active la production de salive et transforme l’aliment en un bol alimentaire pouvant être dégluti sans risque de fausse route.
- Elle initie le processus qui va permettre au corps d’assimiler les nutriments par la fragmentation et l’insalivation des aliments.
- Elle prépare le processus digestif en informant le cerveau de la nature de l’aliment ingéré par des stimulations sensorielles tactiles, olfactives, gustatives.
Les troubles de la mastication
Les données d’enquête collectées lors du Programme National Inter-Régime conduit par l’Assurance Maladie en 2005 auprès d’un échantillon des enfants et adolescents scolarisés en milieu spécialisé ont montré que les troubles de l’alimentation sont plus souvent présents chez les enfants de 6-12 ans scolarisés en milieu spécialisé par rapport aux enfants ordinaires du même âge.
En particulier l’état bucco-dentaire de ces enfants présente plus souvent des éléments prédictifs de troubles de l’alimentation comme les troubles neuro-moteurs, mais également des lésions carieuses, des dents absentes et/ou une dysmorphie dento faciale et rares sont ceux pour lesquels un traitement a été entrepris. (…) Cette population présente donc un risque accru pour les troubles de la mastication.
Les causes peuvent être d’origine primaire :
- Des troubles neuromoteurs d’origine centrale ou périphérique qui compromettent la coordination sensorimotrice nécessaire aux fonctions d’ingestion ;
- Certains syndromes caractérisés par des paralysies ou déformations faciales, des hypotonies ;
ou secondaire :
- Un état bucco-dentaire dégradé par manque d’hygiène ou en raison de troubles comportementaux qui font obstacles aux soins dentaires ;
- Une production salivaire perturbée par certains traitements pharmacologiques ;
- Une modification du comportement alimentaire en raison de troubles du comportement.
Conséquences
- Des troubles digestifs en lien avec un défaut d’insalivation du bol alimentaire, qui entraîne un défaut du premier temps de la digestion.
- Un déséquilibre du régime alimentaire et des troubles de la nutrition notamment suite à des comportements alimentaires restrictifs destinés à éviter les aliments difficiles à mastiquer et à ingérer ;
- Des maladies ou carences nutritionnelles liées à la surconsommation de certains aliments (faciles à mâcher) au détriment d’autres ;
- Un retard du déclenchement du signal de satiété pouvant entraîner une prise de poids, car les bouchées sont avalées trop vite et les prises alimentaires multipliées.
- Des fausses routes primaires voire des fausses routes secondaires en lien avec la stagnation possible d’aliments dans la bouche (stases).
Témoignage de parent
Yannis a tendance à tout avaler sans mâcher, d’où l’obligation de couper la nourriture en petits morceaux, pour empêcher toute fausse route. Il faut toujours être vigilant sur les aliments qu’il peut manger, faire très attention aux fruits comme les pommes, les poires, ne pas laisser d’aliments en évidence pour qu’il continue de manger. Evelyne, une maman
Comment les détecter
Par une observation d’un temps d’alimentation simple (avec des morceaux faciles à croquer et à déglutir de type Boudoir) :
- À partir de l’aliment juste introduit dans la bouche ;
- En plaçant l’aliment directement sous les arcades dentaires si peu ou aucun mouvement de mastication n’a été observé dans le cas précédent.
Dans un cas comme dans l’autre, on observera alors :
- Les mouvements de mastication : ouverture/fermeture des mâchoires, mouvements latéraux de la langue, déplacement ou non des aliments d’une arcade dentaire à l’autre.
- Le nombre de mouvements de mastication avant la déglutition.
Pistes de prise en charge
Chez l’enfant, la prise en charge et la prévention des troubles de la mastication implique :
- un dépistage et un suivi précoce associant l’orthopédie, l’orthodontie lorsqu’elle est possible, l’orthophonie et la kinésithérapie respiratoire ;
- un entraînement de la mastication ;
- la mise en place d’une hygiène bucco-dentaire quotidienne et un suivi bucco-dentaire régulier chez un chirurgien-dentiste.
Si certains troubles neuromusculaires, comme l’hypotonie induite par la trisomie 21 ou les myopathies restent relativement compatibles avec une activité masticatoire, d’autres troubles neurologiques, souvent d’origine centrale, impliquent la reconnaissance de l’incapacité masticatoire, afin de mettre en place un régime alimentaire de texture adapté, voire une gastrostomie. Dans ces situations, le massage intrabuccal, lorsqu’il est appliqué adéquatement, peut assumer partiellement le rôle des stimulations mécaniques générées par la mastication.
Attention :
Il faut savoir que les troubles fonctionnels sont très variables selon les individus et que les possibilités de prise en charge vont varier selon le niveau de coopération de chacun. Il n’est donc actuellement pas possible de systématiser la prise en charge et quel que soit le diagnostic, c’est l’évaluation individuelle – faite par un orthophoniste spécialisé – qui permet de proposer un projet thérapeutique.
Témoignage de parent
Ses difficultés masticatoires la conduisent à avoir une grande quantité de nourriture dans la bouche, ce qui rend encore plus long le processus de mastication et ensuite d’avalage et l’ont souvent obligée à cracher ce qui obstruait. Beaucoup d’écoute et de patience et une attention accrue lors des repas pour que ce qui est mis en bouche soit mâché puis avalé avant d’en reprendre, vigilance sur la taille des morceaux, la cuisson, les textures faciles à mâcher. Maud, maman de Camille
Au quotidien les temps de repas sont donc à prévoir, en pensant à l’installation de l’enfant, à la disponibilité de l’adulte, aux menus proposés, etc.
Certains sites internet et livres proposent des recettes adaptées pour manger mouliné ou mixé sans perdre les saveurs :
https://www.enfant-different.org/alimentation/des-recettes-adaptees/
https://www.enfant-different.org/alimentation/regalez-toute-la-famille-pour-noel/
Auteurs : Pr Martine Hennequin
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